Rapport d’activité – 2015

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ÉDITO par Edouard Donnelly, Président

L’année 2015 aura-t-elle marqué un tournant quant à la prise de conscience des dangers auxquels sont confrontés de nombreux enfants étrangers dans notre pays ? L’exil vers l’Europe auquel se résignent de nombreuses personnes qui fuient un pays en guerre ou des régions qui du monde qui n’offrent que peu de perspectives aux personnes qui y vivent, a en effet été un sujet d’actualité marquant tout au long de l’année. L’opinion publique semble ainsi avoir réalisé les dangers induits par les traversées de la Méditerranée, dangers auxquels s’exposent un nombre croissant de familles et donc d’enfants. En France comme ailleurs, il aura fallu la publication d’une photographie pour que beaucoup ouvrent les yeux sur une réalité pourtant décrite depuis de nombreuses années. Pour autant, malgré l’émotion suscitée par cette image évidemment bouleversante, le sévère quotidien du terrain semble avoir repris le dessus.

Notre activité n’a pas encore été impactée par l’augmentation du nombre de personnes ayant pris les nombreuses routes menant à l’Europe. Nous avons cependant pu constater à de nombreuses reprises comment les événements et les traumatismes vécus lors de ces « voyages » avaient pu marquer certaines et certains. Et dans la continuité des années précédentes, nous avons également été témoins d’imbroglios administratifs et juridiques parfois révoltants puisqu’ils condamnaient des jeunes à une errance les exposant à de nombreux dangers (vie à la rue, exploitation). Comme chaque année depuis des années, nous avons également été confrontés au déroutant fatalisme des enfants vivant en bidonvilles qui savent inéluctable l’énième expulsion de leur lieu de vie. Pour les plus fragiles et les plus exclus, chaque expulsion les éloignera encore un peu plus de la possibilité d’avoir le droit à une vie d’enfant. Et cette année encore, nous avons été témoins des violences subies par des enfants parfois très jeunes contraints par des tiers à voler ou encore à se prostituer et pour lesquels toute prise en charge s’avère parfois très difficile à mettre en œuvre.

Ce contexte, marqué par une prise de conscience générale mais partielle quant à des phénomènes qui touchent de nombreux enfants dans notre pays, aurait pu favoriser l’émergence d’une politique publique favorisant la protection effective des mineurs étrangers en danger. Nous constatons malheureusement que tel n’est pas encore le cas : des discussions constructives ont eté menées pour obtenir la mise en place d’un dispositif expérimental de protection des mineurs présumés victimes de la traite des êtres humains. A l’origine des analyses et des propositions qui se mettront en œuvre en 2016, Hors la Rue considère que d’autres avancées doivent être obtenues, comme la reconnaissance du statut de victimes de ces enfants protégés au titre de l’enfance en danger. Par ailleurs, si la loi sur la protection de l’enfance a pu permettre la relance du dispositif de répartition des mineurs isolés étrangers sur l’ensemble du territoire, aucune avancée significative n’a été obtenue sur le contenu et les modalités des évaluations auxquelles sont soumis les mineurs non accompagnés. Aucune avancée – voire des reculs – quant à la situation des jeunes évalués majeurs mais qui cherchent à faire reconnaître leur minorité par un juge. La zone de non droit dans laquelle ils sont maintenus durant cette attente persiste, s’élargit et continue à avoir de graves conséquences pour ces jeunes migrants. Enfin, la situation des enfants vivant en bidonvilles bien que de plus en plus dramatiques, continue de susciter l’indifférence. Les familles expulsées de leurs lieux de vie sont toujours très nombreuses. Le développement social, affectif, psychologique des enfants s’en trouve évidemment altéré sans que la mobilisation ne parvienne à dépasser les associations et les bénévoles intervenant auprès de ces familles depuis plusieurs années.

La décision du Conseil d’Etat concernant la jungle de Calais et enjoignant l’Etat à procéder à l’installation de sanitaires ainsi qu’au ramassage des ordures permet cependant de révéler que c’est bien le non respect par l’Etat et les collectivités de certaines dispositions légales qui accroît la précarisation des conditions de vie des personnes vivant en bidonvilles, et favorise l’emprise de personnes qui n’hésitent pas à tirer parti de cette immense détresse. Nous avons donc écouté avec intérêt les prises de parole s’agissant des mineurs non accompagnés qui se trouveraient dans les différents sites du Nord et du Pas de Calais. Aux responsables nationaux et locaux, nous souhaitons cependant répéter que, de Calais à la Courneuve, en passant par Marseille et Champs Sur Marne, sans oublier les nombreux territoires où sont installés des bidonvilles ou des squats, l’amélioration des conditions de vie des enfants doit primer sur toute autre considération.

C’est une partie du message parfois cinglant que le Comité des Droits de l’Enfant de l’ONU a adressé à la France dans ses recommandations de février 2016. Espérons qu’après le choc émotionnel viendra le temps de l’action.

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